Un cancer ORL détecté par un test salivaire, une première
Une étude australienne rapporte le premier cas au monde de détection par un test salivaire d’un cancer du pharynx lié au papillomavirus.
GRÂCE À UN DIAGNOSTIC REPOSANT SUR UN TEST RECHERCHANT DANS LA SALIVE L’ADN VIRAL DU HPV DE TYPE 16, IL A ÉTÉ POSSIBLE DE DIAGNOSTIQUER À TEMPS UN CANCER DE LA GORGE.
C’est une première mondiale : un diagnostic par la salive d’un cancer du pharynx en lien avec une infection au papillomavirus. On ne connait pas encore aujourd’hui très bien les liens qui existent entre certains types de papillomavirus (human papillomavirus, HPV) et les cancers de la gorge, mais on sait que le mode de transmission par sexe oral augmente le risque de cancer de la gorge chez l’homme. et que si environ un tiers des cancers oropharyngés sont liés au papillomavirus, la consommation d’alcool, de tabac ou le contact répété avec les poussières de bois sont des facteurs bien plus fréquents, responsables de deux tiers de ces cancers.
Un cancer de la gorge cliniquement « muet » et diagnostiqué à temps
Une récente publication dans la revue Frontiers in Oncology, rapporte un cas survenu chez un homme australien de 63 ans, ancien fumeur, hétérosexuel et adepte du sexe oral avec selon ses déclarations plus de cinq partenaires au cours de sa vie. Grâce à un diagnostic reposant sur un test recherchant dans la salive l’ADN viral du HPV de type 16, il a été possible de diagnostiquer à tmps chez cet homme un cancer de la gorge, qui était cliniquement “muet” comme disent les médecins, c’est-à-dire sans aucun signe d’appel habituel comme une douleur, gêne, saignement…
Cet homme faisait partie d’un groupe de 656 patients, tous a priori en bonne santé et volontaires d’un essai clinique mené dans les universités de Brisbane et Queensland (Australie). Ils ont accepté de se soumettre régulièrement à des dosages dans leur salive d’ADN du HPV pendant plusieurs années, soit 36 mois au total avec un test mis au point par les Drs Chamindie Punyadeera et Kai Dun Tang. En pratique, les patients se rinçaient la bouche avec une solution saline pendant une minute ou deux avant de recracher leur salive dans une éprouvette.
Le patient considéré aujourd’hui comme guéri
Durant le suivi de ces 656 patients, les chercheurs ont observé la présence persistante d’ADN viral chez trois d’entre eux, et chez le patient de 63 ans, c’est même une augmentation croissante de l’ADN viral qui a été repéré avec un nombre de copies virales passant de près de trois copies à l’inclusion de l’essai à plus de 1.000 à 36 mois. L’homme a donc été averti et une consultation ORL a été réalisée. Comme aucune lésion n’était visible, ni à l’œil nu ni lors de l’examen à la lampe, il a été proposé au patient soit une surveillance, soit de retirer les amygdales, option que le patient a choisie. Le chirurgien a alors découvert au cours de l’intervention une tumeur de 2 millimètres, un carcinome à cellules squameuses, au niveau de l’amygdale gauche. Tous les autres tissus étaient normaux et sans ADN viral. Deux semaines après l’amygdalectomie, la charge virale dans les échantillons de salive est devenue indétectable et le patient est aujourd’hui considéré comme guéri par ses médecins.
Reste évidemment à mettre sur pied un essai de grande ampleur démontrant l’utilité de ce test. En France, chaque année, ces cancers de la tête et du cou, 14.000 nouveaux cas et 5.000 décès par an, représentent la quatrième cause de mortalité par cancer en France.
Sylvie Riou-Milliot
Spécialiste santé au magazine Sciences et Avenir