Le cancer est-il héréditaire ?
Environ 5 % des cancers seraient liés à une prédisposition génétique, soit 20 000 des nouveaux cas de cancers chaque année. Quels sont les cancers les plus concernés par ces prédispositions génétiques ? Quels mécanismes entrent en jeu dans la « transmission » d’un cancer ? Réponses et explications avec le Dr Dominique Stoppa-Lyonnet, médecin généticienne.
Plus de 70 % des Français ont déjà entendu parler de prédispositions héréditaires aux cancers mais malheureusement ils sont tout autant (77 %) à déclarer ne pas être assez informés sur le sujet. Pour preuve, un Français sur deux pense que 26 à 50 % des cancers sont liés à des prédispositions héréditaires. En réalité, cela ne concerne que 5 % des cas.
Qu’est-ce qui prédispose un individu à un risque de cancer ?
L’altération d’un gène peut exposer un individu à un risque de cancer supérieur à celui de la population générale. On parle d’hérédité car cette altération peut être transmise à la descendance de génération en génération. Ainsi, dans un couple, si l’homme ou la femme est porteur d’une altération génétique, chaque enfant qu’ils auront ensemble aura un risque sur deux d’avoir le gène altéré.
La recherche en oncogénétique a permis d’identifier plus de 80 gènes de prédisposition aux cancers. Leurs altérations augmentent considérablement le risque de cancer. Les cancers héréditaires les plus fréquents sont le cancer du sein, de l’ovaire et les cancers digestifs.
A noter que 40 % des cancers sont liés à des facteurs extérieurs (tabac, alcool, activité physique insuffisante, alimentation, soleil, pollution…) et pourraient donc être évités.
Cancer du sein et hérédité
Les altérations génétiques des gènes BRCA1 et BRCA2 (et plus rarement PALB2) sont le plus souvent responsables des cancers du sein et/ou de l’ovaire. « On sait qu’une femme porteuse d’une altération du gène BRCA2 a 60 % de risque de développer un cancer du sein à 70 ans« , rapporte le Dr Stoppa-Lyonnet. Treize gènes sont aujourd’hui étudiés lorsqu’on soupçonne une prédisposition génétique de ces deux cancers féminins. On estime que 5 % des cancers du sein et 15 % des cancers de l’ovaire sont liés à ces altérations génétiques. Elles augmentent :
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Le risque de cancer du sein à un âge précoce ;
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Le risque de cancer sur le sein controlatéral après diagnostic d’un premier cancer ;
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Le risque de cancer de l’ovaire après 40 ans.
Cancer colorectal et hérédité
Sur l’ensemble des cancers colorectaux, 2 à 3 % sont dus au syndrome de Lynch, une forme héréditaire de cancers colorectaux sans polypes. En cause, l’altération de quatre gènes : MLH1, MSH2 (responsables d’au moins deux tiers des cas), MSH6 et PMS2.
Ces altérations augmentent :
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Le risque de cancer du côlon et du rectum (risque cumulé de 12 à 48 % avant l’âge de 70 ans en fonction du gène impliqué) ;
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Le risque d’un cancer de l’endomètre (risque cumulé de 16 à 54 % avant 70 ans en fonction du gène impliqué) et des ovaires.
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Le risque de cancer des voies biliaires, des voies urinaires, de l’estomac, de l’intestin grêle et du pancréas.
Prédisposition génétique à un cancer : les signes qui doivent alerter
Le dépistage peut être envisagé selon plusieurs critères :
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L’histoire familiale. Si on observe une même atteinte tumorale dans une même branche parentale. Par exemple, un cancer du sein chez une grand-mère, une mère et sa fille ou une configuration grand-mère paternelle, tante paternelle et nièce. « Il peut y avoir des transmissions par le père d’un risque de cancer du sein« , fait remarquer la généticienne.
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Un âge de diagnostic plus jeune que la moyenne dans la population générale.« L’âge moyen d’un cancer du sein en cas d’altération du gène BRCA1 ou BRCA2, c’est autour de 45 ans. Il peut y avoir des cas plus jeunes ou plus âgés« .
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Des localisations tumorales multiples ou multifocales (plusieurs lésions sur un même organe). Par exemple, une femme qui a un cancer du sein et un cancer de l’ovaire ou un cancer du sein bilatéral (sur les deux seins).