Comment parler du cancer à des adolescents
Les efforts pour rester positif sont louables mais toute personne atteinte d’un cancer sait parfaitement que le sourire qu’elle affiche devant ses proches cache une dure réalité.
Le yo-yo émotionnel que vivent généralement les adolescents n’est pas toujours facile à gérer mais si on y ajoute le cancer d’un membre de la famille, les choses peuvent encore se compliquer.
Chaque année, on dépense des millions dans la recherche sur le cancer, et des progrès importants sont accomplis quotidiennement pour améliorer les traitements et le diagnostic précoce. Pourtant, tous les jours, la souffrance et le courage indéniable des personnes malades m’attriste et m’emplit d’humilité.
Rien que cet été, j’ai entendu parler de trois femmes diagnostiquées, ce qui n’est pas sans conséquence pour leur famille. Elles ont, comme moi, la quarantaine, des enfants, et elles étaient heureuses de franchir dans leur vie une nouvelle étape pleine de promesses. Si la nouvelle est implacable, la sinistre réalité ayant pris le pas sur les probabilités, la lutte qu’il va falloir mener ne l’est pas moins, d’autant que la guérison n’est pas forcément au bout du chemin.
Les efforts pour rester positif sont certes louables mais toute personne atteinte d’un cancer sait parfaitement que le sourire qu’elle affiche devant ses proches cache une dure réalité.
Cependant, après la peur et les doutes personnels, ce sont vos enfants qui accaparent le plus souvent vos pensées. En définitive, n’avons-nous pas toutes et tous grandi dans l’angoisse de ce diagnostic?
Je me rappelle très bien le jour où j’ai annoncé à mes enfants, alors adolescents, que j’avais un cancer. Nous avions déjà discuté ouvertement, en famille, de mon état et des traitements éventuels, le corps médical nous assurant que tout problème avait une solution et qu’aucune cellule cancéreuse n’avait été détectée. Bref, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter.
La mauvaise nouvelle est donc tombée comme un couperet. Le tragique de la situation résidait dans le non-dit et nous savions tous que ce n’était pas bon signe.
Les « pourquoi? » et les « comment? » ont cédé le pas à l’incertitude la plus totale.
Que répondre? « Tout va bien se passer » ne convaincrait personne, même si vous y croyiez fermement. Les adolescents sont perspicaces, ils ont des antennes et Google n’a pas de secrets pour eux.
Comment gérer au mieux cette situation? Il n’y a pas de recette miracle, juste les conseils de ceux à qui on a confié la responsabilité de vous soigner, qui sont confrontés au quotidien à cette maladie, votre propre perception de la situation et la dynamique familiale.
En fonction de mon expérience personnelle, non seulement comme destinataire mais aussi en tant que porteuse de mauvaises nouvelles, voici les conseils que je peux transmettre:
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Ne tenez pas compte de l’opinion des autres. Tout le monde aura son idée sur ce que vous devez dire ou faire. Tant que n’êtes pas prêt(e), ne cédez pas devant ceux qui vous enjoignent d’en parler à vos enfants.
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Attendez que le moment soit propice, que tout le monde soit réuni et que rien ne risque de vous déranger.
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Préparez-vous, et décidez en accord avec votre partenaire qui va mener la discussion et ce que vous allez dire. C’est votre histoire et elle doit être communiquée à votre façon.
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Les faits sont importants. Ne déformez pas la réalité. S’ils sont au courant de ce qui se passe, ils seront moins enclins à imaginer le pire et s’inquiéteront moins.
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Posez les choses simplement. Trop d’informations peuvent s’avérer contre-productives. Dites-leur ce qu’ils ont besoin de savoir. Inutile de les encombrer d’un fardeau émotionnel.
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Encouragez-les à parler ouvertement quand ils le veulent et dites-leur qu’ils ne doivent pas avoir peur de vous poser des questions.
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Soutenez-les. C’est aussi un cauchemar pour eux. Un réseau de proches qu’ils peuvent contacter quand ils en ont besoin est très précieux, tout comme les conseils d’un professionnel. Une tierce personne, sans liens affectifs, peut apporter un soutien objectif.
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Soyez fort(e). Les larmes et la peur sont inévitables mais vos enfants doivent sentir que leur amour et leur soutien vous aident à faire face aux difficultés.
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Ne changez rien à votre manière de les éduquer. Ils ont autant besoin d’amour et de réconfort que de discipline et de limites.
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Rappelez-leur que la vie continue. Bien sûr, tout ne sera pas comme avant mais ils peuvent voir leurs amis, faire la fête, s’amuser et prendre du bon temps. Ils ont besoin d’être certains que ça ne vous dérange pas.